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formuler l’autre : « Tu voudrais que je m’interpose entre vous ?… Mais comment pourrais-je ? »

– « Tu n’as pas tout à fait deviné ma pensée, » répondit Agathe, « Il ne s’agit pas d’un message de moi à lui. Tu es ma sœur. C’est toi qui as connu M. Brissonnet la première et qui me l’as fait connaître. Imagine que tu aies appris, par quelqu’un qui ne soit pas moi, la malveillante remarque de Mme Éthorel. Ne serait-il pas naturel que tu t’inquiétasses ? N’est-il pas naturel d’autre part qu’estimant le commandant comme tu l’estimes, tu le juges absolument incapable de faire quoi que ce soit qui compromette une femme, à moins qu’il ne s’en rende pas compte ?… Je te demande, ma chère Madeleine, d’agir comme tu agirais de toi-même si les conditions étaient celles que je viens de dire. Hésiterais-tu à faire venir M. Brissonnet et à causer avec lui pour l’avertir des commentaires de certains de nos amis ? La conclusion d’un pareil entretien n’est pas douteuse : ou bien il ne m’aime pas, et alors il s’excusera et nous ne le reverrons plus. Ou bien il m’aime, et alors, dans son trouble, il te découvrira son sentiment, il voudra savoir ce qu’il peut espérer… Fine comme je te connais, il te dira tout… Ah ! ma petite Made, tu ne me refuseras pas cela. C’est toi qui as voulu que je le connusse, toi qui m’as tentée. Sans toi, je n’aurais jamais pensé à recommencer ma vie. J’étais si résolue à rester libre ! Tu as vaincu mes