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tomber, après une mortelle minute, ces simples paroles : We are not amused. Nous ne sommes pas amusés. »

– « Enfin ! » dit Madeleine, quand la silhouette cocasse du Vieux Beau eut disparu derrière la porte refermée sous sa tapisserie… « Je croyais qu’il ne s’en irait jamais ! Je m’en veux de n’avoir pas plus de patience, car vraiment il m’a donné cet été de vraies preuves d’amitié… »

– « Je t’avais prévenue à Ragatz, » répondit Agathe. « Tu vas m’accuser d’avoir l’esprit de contradiction, » continua-t-elle, « je le trouve moins ennuyeux ici que là-bas… Et puis il t’a présenté qui tu sais… »

Elle souriait en prononçant ces mots qui firent passer une ombre plus épaisse dans les prunelles de l’autre. Ils soulignaient – naïvement, car Mme de Méris n’y avait pas entendu malice, – l’actuelle position des deux sœurs. Le motif qui rendait Agathe plus facile à vivre, moins rênée, moins nerveuse était précisément celui qui expliquait le changement d’humeur de Mme Liébaut. Comme celle-ci connaissait ce motif, et que celle-là l’ignorait encore, tout entretien entre elles devenait l’occasion de malentendus inintelligibles à l’aînée et douloureusement sentis par la cadette. Agathe ne devina pas le petit battement de cœur que sa simple réponse avait infligé à Madeleine, ni