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du commandant, sur le quai de la petite gare, et ces quatre mois avaient suffi pour que ce dessein, si vague d’abord, se précisât dans des conditions qu’il serait fastidieux d’exposer en détail. Comment la délicate et charmante femme s’y était prise pour aguicher d’abord la curiosité d’Agathe ; – à quels sentiments Brissonnet lui-même avait obéi en se présentant chez les Liébaut, dès son retour, puis en acceptant d’aller chez la jeune veuve plus souvent encore que chez Madeleine ; – quelles émotions, d’ordre très divers, avaient provoquées cette entrée du compagnon préféré du colonel Marchand dans le petit monde du médecin et de sa belle-sœur, ces éléments de ce romanesque épisode se découvriront assez dans les quelques scènes qui en marquèrent le dénouement. L’histoire de presque tous les amours ne tient-elle pas tout entière dans le récit de leurs débuts et celui de leur fin ? Que le lecteur et la lectrice veuillent donc bien se reporter au crayonnage qui a servi de frontispice paisible à ce douloureux récit. Qu’ils imaginent les deux promeneuses de la station de Ragatz assises maintenant l’une en face de l’autre, après ces quatre mois, au coin d’un des premiers feux de l’année, par une après-midi de novembre, dans le petit salon de l’hôtel que le docteur Liébaut s’est fait construire rue Spontini. Un ciel gris tendu de nuages où il flottait déjà de la neige comme suspendue, attristait les hauts carreaux de