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LE DISCIPLE

prendre cet engagement vis-à-vis de son malheureux élève, je lui demande de détruire ce cahier, me fiant à son honneur pour ne pas livrer ce mémoire à qui que ce soit, même pour sauver ma tête. » Et le jeune homme avait signé simplement de ses initiales.

— « Hé bien ? » demanda la mère, tandis que le philosophe feuilletait le cahier, en proie à une anxiété profonde.

— « Hé bien ! » répondit-il en refermant le cahier et tendant la première page aux yeux inquisiteurs de Mme Greslou « ce n’est qu’un travail de philosophie, comme il vous l’avait annoncé. Voyez… »

La mère eut une question sur la bouche, une défiance dans les prunelles tandis qu’elle lisait cette formule technique inintelligible pour son pauvre esprit. Elle avait vu l’hésitation d’Adrien Sixte. Puis elle n’osa pas, et elle se leva en disant :

— « Vous m’excuserez de vous avoir retenu si longtemps, monsieur. J’ai mis ma dernière espérance en vous, et vous ne tromperez pas le cœur d’une mère. J’emporte votre promesse. »

— « Tout ce qu’il me sera possible de faire pour que la vérité soit connue, » dit gravement le philosophe, « je le ferai, madame. Je vous le promets encore une fois. »

Lorsqu’il eut reconduit la malheureuse femme, et qu’il se trouva seul dans son cabinet, Adrien