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LE DISCIPLE

d’excellents esprits entrevoient dès aujourd’hui une réconciliation probable de la Science et de la Religion sur ce terrain de l’Inconnaissable. Pour M. Sixte, c’est là une dernière forme de l’illusion métaphysique et qu’il s’est acharné à détruire avec une énergie d’argumentation que l’on n’avait pas admirée à ce degré depuis Kant.

— Son second titre d’honneur, comme psychologue, consiste dans un exposé très nouveau et très ingénieux des origines animales de la sensibilité humaine. Grâce à une lecture immense et à une connaissance minutieuse des Sciences Naturelles, il a pu tenter pour la genèse des formes de la pensée le travail que Darwin a essayé pour la genèse des formes de la vie. Appliquant la loi de l’évolution aux divers faits qui constituent le cœur humain, il a prétendu montrer que nos plus raffinées sensations, nos délicatesses morales les plus subtiles, comme nos plus honteuses déchéances, sont l’aboutissement dernier, la métamorphose suprême d’instincts très simples, transformation eux-mêmes des propriétés de la cellule primitive ; en sorte que l’univers moral reproduit exactement l’univers physique et que le premier n’est que la conscience douloureuse ou extatique du second. Cette conclusion, présentée à titre d’hypothèse, à cause de son caractère métaphysique, sert de terme d’arrivée à une merveilleuse série d’analyses, parmi lesquelles il convient de citer deux