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LE DISCIPLE

puisque vous tenez à votre vie. Et maintenant, allez-vous-en… »

— « Charlotte… » implorai-je.

— « Si dans une minute vous n’êtes pas sorti, » dit-elle en regardant la pendule, « j’appelle. »


VII

Conclusion.


Et j’obéis ! Le lendemain, dès six heures, je quittai le château, en proie aux plus sinistres pressentiments, essayant en vain de me persuader que cette scène ne serait pas suivie d’effet, que le comte André arriverait assez tôt pour la sauver d’une résolution désespérée, qu’elle-même, au dernier moment, elle hésiterait ; qu’un incident inconnu surviendrait… que sais-je ? Quant à fuir, à reculer devant la vengeance possible du frère, je n’y songeai pas une seconde. Cette fois, j’avais retrouvé du caractère parce qu’une idée était en moi, vivante et qui me soutenait, celle de ne plus me laisser humilier par personne. Oui, si j’avais eu, devant une fille affolée et dans la faiblesse de l’amour heureux, une heure de défaillance, je n’en aurais pas une autre devant la menace d’un homme. J’arrivai à Clermont, dévoré d’une anxiété qui ne fut pas de longue durée, puisque j’appris le suicide de Mlle de Jussat et que je fus arrêté, coup sur coup. Dès les premiers mots du juge d’instruction, j’ai reconstitué tous les détails de