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avait fait son fils, c’était une énigme dont Laurence ne pouvait pas avoir le mot. Une scène avait eu lieu, cette même semaine, entre le jeune homme et sa mère. Celui-ci venait d’avoir trente ans, et, le lendemain de son anniversaire, il avait déclaré son projet d’épouser la fille d’un propriétaire de l’Almanarre. Il n’avait pas prononcé le mot de jardinier. Un trait déconcertant de son caractère, c’était la brusque annonce de résolutions longtemps méditées, et alors un invincible entêtement dans des partis pris qui, chez tout autre, n’eussent été que des à-coups. Mme Libertat le connaissait trop pour ne pas s’en rendre compte, il avait parlé de ce mariage sous l’empire d’une passion qui expliquait d’ailleurs bien des singularités de ces derniers mois : sa sauvagerie grandissante à l’égard de leur monde, ses absences multipliées, soi-disant pour surveiller une écurie qui semblait devenue l’essentiel de sa vie, ses distractions à table