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seul en face de lui-même et pour faire taire la voix intérieure. « Elle est une honnête fille. S’il s’était passé entre elle et ce Libertat quoi que ce fût dont elle eût à rougir, elle me l’aurait avoué. Elle ne voudrait pas devenir ma femme sur un mensonge. Donc, il n’y a rien eu. »

Cet acte de foi dans la probité de Laurence se renouvela pour ce grand et généreux cœur, à toutes les heures, à toutes les minutes, pendant les jours qui suivirent, et toujours en silence. Il se fût méprisé de poser à la jeune fille une question qu’il ne se permettait pas de se formuler à lui-même. L’inexprimé n’en est pas moins torturant, surtout dans le bonheur. On n’est vraiment heureux qu’en l’étant avec toute son âme, et cet effort pour cacher à une fiancée adorée un point de sa sensibilité, lancinant et paroxystique comme une névralgie, eût empoisonné pour le jeune homme cette première