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d’ivrogne, suppurait une énorme loupe qu’il envenimait en l’écorchant sans cesse de ses doigts noirs, aux ongles durs comme des griffes. Cette difformité achevait de donner un aspect hideux au bonhomme. Les autorités toléraient cette existence en marge des lois, aucune plainte n’ayant jamais été portée contre lui, depuis trente années qu’il s’était retiré dans sa hutte. Comme il se parlait tout haut à lui-même, en gesticulant, le long des chemins, les gens le croyaient aliéné Par ce reste de superstition ancestrale qui persévère dans les campagnes, cette folie soupçonnée le revêtait d’un caractère mystérieux. Il était tout voisin d’être tabou. Le vieillard n’ignorait pas ce prestige. Il en jouait, pour extorquer des subsides avec d’obscures menaces, jamais exécutées, mais qui avaient fini par l’entourer d’une malveillance universelle. Il faisait peur, et on ne l’aimait pas. La joie avec laquelle le jeune garçon pêcheur d’oursins