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De quel accent, tout à l’heure, il avait prononcé ce nom de Libertat ! Quelle douleur de rancune avait assourdi sa voix, noué son visage, secoué tout son corps ! Au souvenir de cet éclat, le frisson de crainte subi par la jeune fille sur le moment même se changeait en une émotion singulière. C’était comme si une chaleur qu’elle ne connaissait pas s’était soudain approchée d’elle. Elle avait toujours rencontré, depuis son retour au pays, un Pascal doux, attristé, résigné. Cette humilité soumise n’avait jamais touché dans son être la fibre intime que venait d’atteindre cette parole rude, ce regard d’indignation, cette révolte fière. Malgré ses anxiétés, pourtant bien vives, elle n’arrivait pas à exorciser la silhouette du jardinier en vêtements de travail, le col et les bras nus, ses fortes mains crispées sur le manche du bêchard, en proie à une passion qui lui donnait, dans son attitude de travail, une si mâle beauté. Tandis qu’elle