Page:Bourget - Laurence Albani, Plon-Nourrit.djvu/173

Cette page n’a pas encore été corrigée

flottait toujours, la face presque à l’air, maintenant. J’ai eu encore plus peur. J’ai eu une autre idée : aller à Toulon me faire mousse. J’ai pensé : « On m’arrêtera. » Je suis retourné au Ceinturon, dans le bois. Le jour a passé. J’ai eu faim. Je me suis dit :

« Je ne veux pas voler. » Alors, j’ai pensé : « Il y a là Mlle Albani. Elle me donnera à manger. »

Un nouveau sanglot le convulsa. Il jeta sa tête sur les genoux de Laurence, en s’y cramponnant, d’une prise si désespérée qu’elle ne le repoussa point. Elle n’avait plus que de la miséricorde pour cette pauvre et chétive loque vivante dont elle écoutait gémir la détresse. D’un geste maternel, comme l’instinct de la femme en trouve dans l’émotion devant les êtres faibles, elle se mit à flatter doucement les cheveux de l’enfant dont la plainte s’apaisa peu à peu sous cette caresse, et, dans l’épuisement de son extrême lassitude, il commença de dormir.