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le matin, qu’elle approchait de la crise décisive, se faisait plus aiguë, depuis les discours de Mme Béryl.

– « Évidemment, on cause, » se répétait-elle, « et les gens sont si méchants. »

Sa conscience ne lui reprochait rien. Pourtant elle ne se prononçait pas cette phrase sans remords. Elle savait trop que dans toutes ces bastides connues devant lesquelles elle passait, une question avait du être posée vingt fois sur elle comme sur toutes ses compagnes : « Qui fréquente Laurence ? » C’est le mot du pays qui signifie une cour innocente, mais une cour. Fréquenter deux jeunes gens, c’est déjà être coquette, avoir perdu cette fleur d’honnêteté dont les filles du peuple ont une notion plus raffinée peut-être que les filles du monde. Étant moins préservées par leur milieu, elles sentent davantage le danger des familiarités masculines. Oui, Laurence ne gagnait pas le rendez-vous fixé par la mère d’un de