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cachait son visage. La chair des mains disait seule la vie dans cet énorme paquet d’étoffes, affalé contre la terre. Les doigts allaient et venaient, agiles, dégageant les tiges des fleurs sous les feuilles. Dès qu’une poignée de ces fleurs était cueillie, la paysanne détachait de sa ceinture un brin de raphia et liait son bouquet qu’elle jetait ensuite dans un panier. Elle montrait alors son visage, dont la bouche, serrée par la chute des dents, accentuait le caractère concentré. Françoise Albani était une femme pénible, pour parler son langage. Elle portait sur tout son être l’empreinte d’un demi-siècle de labeur. Dès sa sixième année, elle avait, comme le petit Virgile, marché le long des routes, ployée sous les fagots. Sa jeunesse durant, elle s’était gagné son trousseau à faire des journées. Mariée, elle avait eu sept enfants. Trois seulement survivaient. Le dur travail, ces deuils, les soucis de l’avenir, avaient mis sur son visage