sur ce point si personnel et si intime. Chez Mme Scilly, le principe constant de la vie était la raison. Très sincèrement croyante et très pieuse, elle ne connaissait pas cette fièvre de tout l’être qui donne aux croyants qu’elle possède une soif et une faim de martyre. Pour elle, la religion était une règle, un soutien de son existence morale, une fortifiante et consolante espérance. Chez Henriette, qui tenait cette disposition de son père, de cet héroïque soldat, petit-fils lui-même d’un héros, le principe était l’enthousiasme. Elle appartenait à la race de ces âmes qui transportent toute leur sensibilité dans les idées auxquelles elles se donnent. Le mysticisme est la forme que la religion revêt presque nécessairement dans de telles âmes, car c’est en cela qu’il consiste par essence, dans le pouvoir d’aimer de tout notre cœur ce que nous croyons avec tout notre esprit. Quoique Mme Scilly n’eût pas démêlé aussi nettement cette diversité de structure mentale qui la séparait de sa fille, elle avait constaté chez cette dernière et vers la quinzième année des symptômes d’exaltation trop significatifs pour n’en avoir pas été un peu effrayée. À cette époque-là Henriette n’avait-elle pas caressé le projet de prendre le voile, avec une telle insistance que la comtesse s’était depuis lors efforcée sans cesse de modérer, ou plutôt d’assagir en elle cette trop brûlante ardeur de piété ? Ç’avait été une des raisons
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