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Pour toute réponse, cette fois, la jeune fille poussa son cheval plus vite encore. Jules pouvait voir l’impression que produisait ce discours, tout voisin d’être trop hardi, au gonflement du corsage de la farouche amazone, soulevé d’une respiration plus hâtive. Que risquait-il à être plus explicite encore ? Et il continua :

— « Vous m’avez tant intéressé, tout de suite, mademoiselle… J’aime le courage, d’abord, je sors d’une race de soldats. Et vous étiez si brave, dans vôtre lutte avec cet apache !… Et puis, je vous ai trouvée si jolie quand vous vous êtes relevée, avec vos beaux cheveux blonds envolés en auréole autour de votre tête, avec votre pâleur où brûlaient vos grands yeux, avec le frémissement de votre belle bouche, avec… »

Elle l’écoutait, sans le regarder, et poussait toujours le cheval cap de maure, dont les actions étaient tout autres que celles de la bête de Maligny. — « Je vais claquer Galopin, » pensait celui-ci, « mais ça en vaut la peine. » Comme il se prononçait ces mots, si différents de ceux que proféraient ses lèvres, il vit tout à coup, suivi d’une stupeur qui, pour une seconde, le décontenança, la monture de Hilda virer littéralement sur place. Au risque de se tuer, l’énergique écuyère venait de faire exécuter, à son Irlandais, un tête-à-queue suivi, aussitôt, d’un galop du côté de l’écurie. Lorsque Jules eut lui-même retourné son cob, elle était à plus de cent mètres déjà. Cette manière de lui fausser compagnie ne prêtait pas à l’équivoque.

— « Ça y est… », se dit le jeune homme. « La gaffe ! La grande gaffe ! Elle s’est fâchée de mon espèce de déclaration. Serait-ce une honnête fille, par hasard ?… Bah ! Elle ne peut pas être bien en colère… J’ai trouvé ses yeux jolis et je le lui ai