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III

JULES DE MALIGNY


La blessure, ou, plutôt, les blessures dont le jeune homme plaisantait ainsi, n’avaient rien de très grave. Elle étaient, cependant, assez profondes pour qu’une fois rentré rue de Monsieur, il dût s’aliter, en proie à une telle fièvre, que le médecin parut redouter une menace de tétanos. Il lui avait bien fallu raconter à sa mère une portion de la vérité. Mais toujours persuadé qu’il avait eu affaire à une aventurière de la galanterie, il avait simplement parlé d’une promeneuse attaquée par un rôdeur, dans une allée perdue du Bois, sans mentionner ni la beauté de la jeune fille, ni son âge. Mme de Maligny n’avait pas eu de motif pour l’interroger sur des détails dont elle ne pouvait soupçonner l’importance. Son caractère se trouve avoir exercé une action si directe sur la suite de cette aventure, qu’avant de pousser plus loin ce récit, il est indispensable d’en donner un crayon, comme aussi de celui de son fils.

La mère de Jules était, au physique, une femme de plus de soixante ans, dont on devinait, à la voir, qu’elle avait été délicieusement jolie. La finesse de ses traits, la minceur de ses pieds et de ses mains, sa démarche et son port de tête suffisaient à dénoncer la Dame, même sans la grâce et la hauteur, tout ensemble, de ses façons. Si vous aviez passé un matin dans ces années-là, vers les sept heures, sur