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leurs montures, sur ce mot de la jeune Anglaise, non moins consciencieusement professionnelle que son cousin :

— « Nos chevaux seront plus sages, madame, si nous ne les poussons pas tout de suite. »

Corbin, qui ne voulait ni quitter sa cousine, ni pourtant avoir l’air de la surveiller, suivait par derrière, mêlé à un groupe d’autres maquignons de sa connaissance, venus, comme lui, présenter des chevaux. Il était monté sur le Norfolk, lequel avait grand besoin, comme avait dit Bob Campbell, d’être habitué aux trompes et aux chiens, car, depuis que le laisser-courre avait été donné, cet animal montrait une telle inquiétude, que même l’excellent cavalier qu’était John devait éployer tout son art pour le retenir. Le brave garçon ne pouvait donc avoir l’œil aussi constamment qu’il aurait voulu sur les faits et gestes de sa cousine. Mais il devinait son énervement, lui qui savait avec quelle tranquille maîtrise elle montait d’ordinaire, à sa manière crispée de se tenir, aux sursauts qu’elle imprimait à sa monture par des à-coups involontaires, à sa façon saccadée de pencher sa tête à droite et à gauche, en avant et en arrière… Qui épiait-elle avec cette évidente angoisse, sinon Louise d’Albiac et Jules de Maligny, lesquels, en ce moment, galopaient aussi, d’un tout petit galop de départ, dans la même route de forêt ? Ils étaient, pourtant, séparés. Louise n’avait auprès d’elle, que son père. Maligny s’attardait à causer avec un de ses camarades, un autre fanatique de la chasse à courre, et ils échangeaient ensemble, tout en s’arrêtant de minute en minute, des phrases qu’un troisième cavalier, un petit coulissier faufilé là et qui montait un carcan de louage, déjà essoufflé, écoutait, bouche bée :

— « …Oui, le valet de limier l’a dit. Ce n’est pas