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— « Elle n’a pas lu ce papier, » répondit Corbin. Il n’avait point paru s’apercevoir de la colère où les mots « ce que je dis » avaient jeté son interlocuteur. « Elle n’était pas là quand la chose est arrivée… J’ai vu l’adresse. J’ai pensé : C’est bien étrange !… La marque au crayon m’a frappé l’œil… Je me suis assuré de ce que c’était. J’ai pris l’avis d’un ami, d’un réel ami, — un entraîneur, mais un gentleman, — un Français, mais aussi vrai qu’un Anglais… Il m’a expliqué le sens de toute cette saleté. Voilà pourquoi je suis ici… »

— « Il est déjà très heureux que vous ayez épargné cette lecture à miss Hilda, » repartit Jules, avec une ironie où frémissait encore une révolte à peine contenue. « Tout cela ne m’explique pas ce que vous avez prétendu dire tout à l’heure, en m’assimilant à ceux qui n’ont pas respecté miss Hilda ? Parlez… »

— « En quoi ? », répondit Corbin. « Premièrement, en essayant de vous faire aimer d’elle sans l’aimer vraiment vous-même… Laissez-moi parler, »insista-t-il, devant un geste négatif de Jules, « puisque vous m’avez demandé de parler… Secondement, en ne prenant pas soin de son bon renom… Oui. Elle n’a personne pour l’avertir. Sa mère est morte. Pauvre femme !… Sans doute, je suis là, moi ; mais je n’ai pas pu prévenir mon oncle. Il a été déjà trop malheureux. S’il se tourmentait sur sa fille, il serait capable de tout quitter, et les affaires ne marchent pas comme ça devrait. Il a perdu un lot de monnaie au Stock-Exchange. Il doit continuer avec sa firm, regagner cet argent, pour que notre Hilda soit riche… je n’ai pas pu la mettre en garde, non plus, elle, contre vous… Elle aurait cru que c’était jalousie. Elle est sans défense. Il ne lui est jamais venu en tête qu’en se promenant avec vous, comme elle fait chaque jour,