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de travail, dit-il, qu’à une violente encéphalite durant laquelle toutes les fonctions de la vie furent suspendues en moi. » Il connut alors les grandes œuvres de l’exégèse allemande, qui borne la critique religieuse à la critique des sources de la tradition religieuse, et c’est à la suite des objections toutes philologiques de cette exégèse qu’il arriva, mais lentement, à ne plus croire à la divinité des livres soi-disant révélés. « Mes raisons, écrit-il à la fin du récit de ce qu’il appelle sa Nephtali, sa lutte intime, mes raisons furent toutes de l’ordre philologique et critique ; elles ne furent nullement de l’ordre métaphysique, politique, moral… » Heure par heure la négation s’établit en lui avec une évidence qui ne lui permettait plus de porter sans hypocrisie la soutane du sulpicien. Le 6 octobre 1845, il descendait les marches de Saint-Sulpice pour aller jusqu’à un petit hôtel au coin de la place, où il avait retenu une chambre. Il croyait d’abord n’avoir brisé qu’avec une profession. Il se trouva qu’il avait brisé avec le christianisme tout entier.

Les observateurs de la vie morale ne manqueront pas de remarquer l’état d’entière séré-