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organe de grand orateur, une de ces voix enchanteresses, qui sont une musique pour l’oreille, et dont la séduction persuasive est irrésistible. C’était la supériorité absolue de cet homme incomplet. Ce devait être aussi la raison de son inefficacité. Il aura passé les longues années de son exil en province, qui auraient pu être fécondes, à causer, au lieu d’écrire, à s’épancher en d’interminables discours, chez mon oncle, chez le docteur Pacotte, partout où son auditoire vibrait d’accord, au lieu de se préparer, par de fortes études, au retour trop certain de son parti aux affaires. Mais, encore un coup, c’est plus tard que la personnalité de Montescot s’est dessinée ainsi dans ma pensée. Sur le moment je n’eus qu’une impression confuse de désappointement, aussitôt dominée et chassée par une autre, d’étonnement, d’intérêt et de curiosité : le nouveau venu amenait par la main un petit garçon, qui devait avoir exactement mon âge, et dont l’existence n’avait jamais été mentionnée, dans les propos échangés autour de moi ces jours derniers. — « Je me suis permis de prendre avec moi mon pupille, » dit-il simplement à M. Pacotte, « pour ne pas le laisser seul à la maison… » — « Et vous avez bien fait, » répondit le docteur, « il aura un petit camarade. Comment s’appelle-t-il ? » — « Je m’appelle Octave, » dit le petit garçon lui-même. — « Hé bien, Octave, » reprit notre hôte en mettant le bras de l’étranger sur mon bras, « voici un