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ieu parisien dont cette femme est la vivante incarnation, — que cette existence, avec son éréthisme de vanité et son obsession du luxe du voisin, n’est pas seulement féconde en ridicules. Elle finit par devenir un vice du cœur, qui se dessèche et se fane, comme fait le teint le plus éclatant au régime quotidien des dîners en ville et des sorties du soir. La preuve en est que la mère de Reine a tenu parole. Par une de ces anomalies de conscience que l’on doit constater, en renonçant à les expliquer, elle ne pardonne pas à sa fille un bonheur qu’elle continue de considérer comme la plus abominable ingratitude. Dans cette espèce de campagne sociale, entreprise en vue de conquérir et de maintenir ce qu’elle appelle toujours « une position de monde », elle pense à sa fille avec les sentiments que put éprouver Napoléon, lorsqu’il vit les Saxons tourner sur le champ de bataille de Leipzig. Mais elle n’est pas plus que l’Empereur de ces volontés qui se rendent, et vous la verrez, si vous êtes vous-même esclave des mortelles corvées du Tout-Paris, continuer seule à en subir les moindres exigences, à en accomplir les moindres rites, sans but, maintenant que l’établissement de sa fille n’est plus en question, sans espérance, — pour l’honneur ! Son nom figurait ce matin dans les « Mondanités » des divers moniteurs du snobisme, parmi les donatrices d’un mariage comme celui qu’elle aurait voulu faire faire à Reine : « Monsieur et Madame Hector Le Prieux, boîte en cristal et or… » Il figurait hier, sous la même rubrique et à la même place des mêmes journaux