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d’équité intérieure, avec laquelle les consciences à courageux parti-pris se jugent elles-mêmes, lui faisait établir comme une comparaison entre ce manque de confiance et le sacrifice à quoi elle s’était décidée pour cette mère. Non. L’image qui, à ce premier moment, l’empêchait d’écrire son généreux et imprudent billet, c’était celle de Mlle Perrin, de cette bonne créature, qu’elle savait si scrupuleuse, si attachée à son devoir. Elle savait aussi que Fanny avait en elle la foi la plus aveugle, que jamais un doute ne s’élèverait dans son esprit sur le hasard de cette rencontre avec Charles, ni aucune objection, si Reine la laissait un peu derrière elle pour parler à son cousin, sans même lui donner d’explication. D’abuser cette humble et discrète amie fut intolérable à la jeune fille… Et puis… Et puis, l’amour fut le plus fort, et, pour la première et dernière fois de sa vie, la délicate Reine s’abandonna au plus véniel, d’ailleurs, au plus excusable des compromis de conscience. Elle se dit qu’elle déclarerait à Fanny Perrin, en lui proposant d’aller aux Tuileries, le rendez-vous donné à Charles. Si la vieille demoiselle n’y consentait pas, Reine y renoncerait. Elle serait toujours à temps d’inventer autre chose. Si elle avait voulu être tout à fait sincère avec elle-même, elle se serait avoué qu’elle ne courait pas beaucoup de chances d’être exposée à ce nouvel effort d’imagination. Elle était trop certaine que Fanny, qui l’adorait, ne trouverait jamais la force de lui dire non. Pourtant cette réserve lui rendit possible de reprendre sa plume et d’écrire enfin ce billet : « M0n cousin, «