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précède chez l’homme toute entrée dans le complet amour ? Comme il arrive à des moments pareils, leurs discours se faisaient d’autant plus calmes et indifférents que leurs cœurs étaient plus troublés. Ces deux amants, qui se retrouvaient, après une journée dans la plus romanesque exaltation, dans la solitude de cet asile étranger, semblaient n’avoir à se dire que des phrases sur le monde qu’ils avaient quitté. Ils se séparèrent de bonne heure et comme s’ils se fussent dit adieu pour ne se voir que le lendemain, quoiqu’ils sentissent bien tous deux que dormir séparés l’un de l’autre ne leur était pas possible. Aussi Hubert ne fut-il pas étonné, quoique son cœur battit à se rompre, lorsque, au moment où il allait lui-même se rendre auprès d’elle, il entendit la clef tourner dans la porte. Thérèse entra, vêtue d’un long peignoir souple de dentelles blanches, et dans ses yeux une douceur passionnée. « Ah ! » dit-elle en fermant de sa main parfumée les paupières d’Hubert, « je voudrais tant reposer sur ton cœur ! »

Vers le milieu de la nuit, le jeune homme s’éveilla, et, cherchant des lèvres le visage de celle à qui il pouvait désormais donner vraiment le doux nom de maîtresse, il trouva que ces joues,