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inquiet. Le bateau est dans le port, les passagers débarquent et se précipitent vers les wagons. Hubert est presque le seul qui s’arrête dans la petite ville. Il laisse sa malle partir pour Londres, et il prend place avec sa valise dans une des voitures qui stationnent devant la gare. Il a bien eu comme un passage de mélancolie en parlant au cocher et en constatant, quoiqu’il en soit à son premier voyage en Angleterre, combien son anglais est correct et intelligible. Il se rappelle son enfance, sa gouvernante venue du Yorkshire, le soin que sa mère avait de le faire causer tous les jours. Si elle le voyait pourtant, cette pauvre mère !… Puis, ce souvenir s’efface, à mesure que la légère calèche, enlevée au trot d’un petit cheval, gravit allègrement la rampe rude par laquelle on accède à la ville haute. L’admirable paysage de mer se développe à la gauche du jeune homme, gouffre démesuré d’un vert pâle, confondu à sa ligne extrême avec un gouffre bleu, et parsemé de barques, de goélettes, de bateaux à vapeur. Sur la hauteur, le chemin tourne. La voiture abandonne la falaise ; elle entre dans une rue, puis dans une seconde, puis dans une troisième, bordées de maisons basses dont les fenêtres en saillie laissent apparaître derrière leurs vitres des rangées de géraniums rouges et de fougères. À un détour, Hubert