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— « Mon ami, » dit-il en prenant la main d’Hubert et avec un son de voix où rien ne transparaissait plus de la dureté du commencement de leur conversation, « je t’estime trop pour croire que tu m’associerais à quelque action qui déplût à ta mère. Je ferai ce que tu désires, mais à une condition… » et comme les yeux d’Hubert trahissaient une inquiétude nouvelle : « Rassure-toi, c’est tout simplement que tu me fixes la date où tu comptes me rembourser cet argent. Je veux bien t’obliger, » continua le vieux soldat ; « mais cela ne serait digne ni de toi, si tu m’empruntais une somme que tu crusses ne pas pouvoir rendre, ni de moi, si je me prêtais à un calcul de cet ordre… Veux-tu revenir demain dans l’après-midi ? Tu m’apporteras le tableau de ce que tu peux distraire chaque mois de ta pension… Ah ! il ne faudra plus offrir de bouquets, de dîners au Café Anglais ni de souvenirs… Mais n’as-tu pas vécu si longtemps sans cette sotte dépense ?… » Ce petit discours, où l’esprit d’ordre essentiel au général, sa bonté de cœur et son sentiment de la régularité de la vie se mélangeaient en égale proportion, toucha Hubert si profondément qu’il serra les doigts de son parrain sans répondre, comme brisé par des émotions qu’il n’avait pas dites. Il se doutait bien, tandis que cette entrevue avait lieu