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amantes, les femmes passionnées savent se rendre indispensables à l’être qui fait l’objet de leur passion. Avec une minutie de soins féconde en intimes délices, elles s’étaient complu à aménager pour Hubert le plus adorable appartement de garçon qui se pût rêver. Elles avaient fait agrandir un pavillon qui se trouvait par derrière l’hôtel, en retour sur un petit jardin, contigu lui-même au jardin immense de la rue de Varenne. Des fenêtres de sa chambre à coucher, Mme Liauran pouvait voir les fenêtres de son fils, qui possédait ainsi à lui un petit univers indépendant. Les deux femmes avaient eu l’esprit de comprendre qu’elles ne retiendraient Hubert tout à fait auprès d’elles qu’en devançant le désir d’une existence personnelle, inévitable chez un homme de vingt ans. Au rez-de-chaussée de ce pavillon, deux vastes salles, de plain-pied avec le jardin, renfermaient, l’une un billard, l’autre l’appareil nécessaire à l’escrime. C’est là qu’Hubert recevait ses amis, lesquels se composaient de quelques jeunes gens du faubourg Saint-Germain ; car Mme Castel et Mme Liauran, quoiqu’elles ne fissent guère de visites, avaient conservé des relations suivies avec toutes les personnes de ce centre qui s’occupent d’œuvres de charité. Cela fait une société à part, très différente du clan mondain et unie d’une