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sa curiosité de connaître son rival de Trouville était déjà bien malsaine. Il en était d’elle comme de la faute de Thérèse. C’est la ténébreuse, l’indestructible mémoire de la chair, qui agit à l’insu de l’être qu’elle domine. Il y avait un peu du souvenir de toutes les caresses données et reçues depuis la nuit de Folkestone, dans ce désir de constater l’existence réelle de l’homme haï et d’en repaître ses regards. Cela devint quelque chose de si âpre et de si cuisant, qu’après avoir lutté longtemps, et avec la sensation qu’il se diminuait étrangement, Hubert n’y put résister ; et voici quel procédé presque enfantin il employa pour réaliser son singulier désir : il calcula que La Croix-Firmin devait appartenir à un cercle à la mode, et il eut tôt fait de découvrir son nom et son adresse dans l’annuaire d’un club élégant. C’est à ce club qu’il recourut pour savoir si le personnage était à Paris. La réponse fut affirmative. Hubert fit la reconnaissance de la rue de La Pérouse, au numéro 14 ter de laquelle habitait son rival, et il se convainquit aussitôt qu’en se tenant sur le trottoir d’une des places que coupe cette rue il pourrait surveiller la maison, un hôtel à deux étages qui ne contenait certainement qu’un très petit nombre de locataires. Il s’était dit qu’il se posterait là un matin : il attendrait