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desséchée et déchirante : « Mais pourquoi ? pourquoi ?  »

Oui, pourquoi ? pourquoi ? — Cette angoisse d’ordre tout moral accompagna dès cette minute l’angoisse de la vision physique. Hubert commença de penser, non plus seulement à son mal, mais à la cause de son mal. Brûler ces lettres, lacérer ce portrait, briser, jeter la chaîne, la bague, détruire ce résidu suprême de son amour, cela lui aurait été aussi impossible que de déchirer avec le fer le corps frémissant de sa maîtresse. C’étaient, ces objets, des personnes vivantes, avec des regards, des caresses, des palpitations, une voix. Il referma le tiroir, incapable de supporter plus longtemps la présence de ces choses qui lui semblaient faites avec la substance même de son cœur. Il se jeta sur la chaise longue, et il se perdit dans le gouffre de ses réflexions. Oui, Thérèse l’avait aimé, Thérèse l’aimait ! Il y a des larmes, des étreintes, une chaleur d’âme, qui ne mentent pas. Elle l’aimait, et elle l’avait trahi ! Elle s’était donnée à un autre, avec son nom à lui dans le cœur, moins de six semaines après l’avoir quitté ! Mais pourquoi ? pourquoi ? Poussée par quelle force ? Entraînée par quel vertige ? Envahie par quelle ivresse ? Qu’était-ce donc que la nature, non plus de « ces femmes-là », —il n’avait plus de férocités de pensée maintenant, —