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Il y avait encore, par-dessous les lettres et les dépêches, un portrait d’elle, où elle était représentée dans le costume qu’elle portait à Folkestone : une simple jaquette ajustée en drap et un chapeau avancé dont l’ombre tombait un peu sur le haut du visage. Elle avait fait faire cette photographie pour le seul Hubert, et, en la lui donnant, elle lui avait dit : « Je pensais tant à nous, pendant que je posais… Si tu savais comme ce portrait t’aime !… » Et Hubert se sentait réellement aimé par ce portrait. Il lui semblait que de cet ovale du visage, que de cette bouche fine, que de ces yeux baignés de songe, un effluve tendre se détachait, l’enveloppait ; et c’est alors qu’à côté de la vision de la perfidie commença de nouveau à se dresser la vision de l’amour de Thérèse. Aussi évidemment qu’il savait, par son aveu, que cette femme l’avait trompé, il savait, par ses souvenirs, qu’elle l’avait aimé, qu’elle l’aimait encore. Il la revit telle qu’il l’avait laissée sur le canapé de leur cher asile, avec sa face convulsée et ses larmes, surtout, Dieu ! quelles larmes ! Pour la première fois depuis cette heure fatale, il se rendit compte de la noblesse avec laquelle elle s’était confessée de sa faute, quand il lui était si aisé de mentir, et il laissa soudain échapper ce cri qui ne lui était pas encore venu à travers ses journées de douleur