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héritée de la faute d’une mère. C’était de sa mère, en effet, misérable créature conduite par l’ennui et l’abandon, toute froide qu’elle fût, à de coupables égarements, que Thérèse tenait son imagination rêveuse, tandis qu’il coulait dans ses veines le sang brûlant de son vrai père, le beau comte Branciforte. Avec cela cette enfant d’un libertin et d’une affolée avait été élevée, sans principes religieux ni frein d’aucune sorte, par Adolphe Lussac, homme très immoral que les vivacités de la petite fille amusaient et qui, de bonne heure, avait fait d’elle la convive de bien des dîners où elle entendait tout ce qu’elle n’aurait pas dû entendre, où elle devinait tout ce qu’elle aurait dû ignorer. Qui calculera la part d’influence attribuable, dans les chutes d’une femme de vingt-cinq ans, aux discours écoutés ou surpris par la fillette en robe courte ?

Thérèse, ainsi élevée, mariée très jeune, n’était donc pas arrivée jusqu’à sa rencontre avec Hubert sans avoir eu de ces aventures que la plupart des femmes ont aussitôt, contrairement à la théorie célèbre de la crise, ou qu’elles n’ont jamais. Mais les deux intrigues qu’elle avait traversées de la sorte avaient été pour elle l’occasion de tels dégoûts qu’elle s’était juré de ne plus jamais avoir d’amant. Hélas ! il en est des bonnes résolutions