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demanda-t-il. En fouillant anxieusement tous ses souvenirs, il ne put trouver que ce nom eût jamais été prononcé par elle… Si, cependant… Il aperçut soudain, et dans un coin perdu de sa mémoire, les syllabes de ce nom haï déjà. Il les avait vues imprimées dans un article de journal sur les fêtes de Trouville. C’était sur une feuille du boulevard, certainement, et dans une série où il avait remarqué aussi le nom de sa maîtresse. Par quel hasard ce petit fait, insignifiant en lui-même, revenait-il le tourmenter à ce moment ? Il douta de son exactitude et prit une voiture pour aller jusqu’aux bureaux du seul journal qu’il lût d’habitude. Il feuilleta la collection et remit la main sur l’entrefilet, dont il se souvenait sans doute parce qu’il l’avait lu plusieurs fois à cause de Thérèse. C’était le compte rendu d’une garden party organisée chez une marquise de Jussat. Est-ce que cela prouvait seulement que ce M. de La Croix-Firmin eût été présenté à Mme de Sauve ? « Ah ! » s’écria le pauvre enfant à la suite de ces meurtrières réflexions, « est-ce que je vais devenir jaloux ? » Cela lui représentait une idée insupportable, car rien n’était plus contraire que la défiance à la loyauté innée de toute sa nature. Il se ressouvint alors de la chaude tendresse que son amie lui avait prodiguée depuis le premier