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coup si entièrement inattendu qui venait de le frapper. Le caractère de la race d’action à laquelle il appartenait se manifesta par une reprise de possession de lui-même. Il écarta dès l’abord toute idée d’une invention calomnieuse de la part de sa mère et de son parrain. Que ces deux êtres détestassent Thérèse, il le savait. Qu’ils fussent capables d’oser beaucoup pour le détacher d’elle, il venait d’en avoir la preuve. Oui, Mme Liauran et le comte pouvaient tout oser, tout, excepté mentir. — Ils croyaient donc à ce qu’ils avaient dit, et ils le croyaient sur la foi de George Liauran, lequel avait colporté un des mille bruits infâmes de Paris ; mais dans quel but ? L’esprit d’Hubert, en ce moment, n’admettait pas qu’il y eût un atome de vérité dans l’histoire des relations de sa maîtresse avec un autre homme. Il ne s’attarda pas à discuter le fait en lui-même, il pensa uniquement au personnage de la bouche de qui venait le récit. À quel mobile avait donc obéi ce cousin auquel il allait maintenant demander une explication ? Il le vit en imagination avec son visage mince, sa barbe en pointe, ses cheveux courts et son fin regard. Cette vision suscita en lui un singulier sentiment de malaise qui était, sans qu’il s’en doutât, l’œuvre de Mme de Sauve. Jamais George n’avait jusqu’ici parlé d’elle à Hubert d’une manière qui comportât