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— « Vous vous trompez, maman, » répondit Hubert, qui avait subi ce premier assaut sans parler. « Mme de Sauve n’est rien de ce que vous dites. Mais comme je n’admets pas qu’on insulte mes amies devant moi, à la prochaine conversation de ce genre que nous aurons ensemble, je vous préviens que je quitterai la maison… » Et sur cette réplique, prononcée avec le sang-froid que lui avait laissé le sentiment de l’injustice de sa mère, il sortit de la chambre sans ajouter un mot.

— « Elle lui a perverti le cœur, elle en a fait un monstre, » disait Mme Liauran à Mme Castel en lui racontant cette scène, qui fut suivie de vingt jours de silence entre la mère et le fils. Ce dernier se montrait au déjeuner, baisait sa mère au front et lui demandait de ses nouvelles, s’asseyait à table et n’ouvrait pas la bouche durant les repas. Le plus souvent, il n’assistait pas au dîner. Il avait confié ce chagrin, comme il confiait tous ses chagrins, à Thérèse, qui l’avait supplié de céder.

— « Fais cela, » disait-elle, « quand ce ne serait que pour moi. Il m’est si cruel de songer que je suis dans ta vie le principe d’une mauvaise action… »

— « Noble amie ! » avait dit le jeune homme en lui couvrant les mains de baisers et se noyant sous