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le crépuscule des dieux

— Tu as déjà, demanda-t-il d’un air de familiarité, une parente dans ma maison ?

— Elle est ma sœur de mère, dit l’Italien laconiquement, en désignant Emilia.

— Eh bien, reprit Son Altesse pour ne point rester court, désormais je t’attache à ma propre personne. Tu seras l’un des valets de pied de mon carrosse.

Il n’était pas loin de trois heures ; une lueur livide filtrait à travers les carreaux de la serre, et le Duc commençait à marquer quelque impatience, quand M. Smithson reparut. Il était allé donner ordre à tous les derniers préparatifs, et ramenait de Blankenbourg la chaise de poste de Son Altesse. Alors, après plusieurs tours en silence, le maintien sombre et les yeux baissés, Charles d’Este ouvrant une porte, descendit les degrés à pas lents, et tout le monde le suivit.

Une longue file de voitures attendait en face du perron, où les derniers lampions s’éteignaient. Le calme partout ; aucun bruit. Le Rocher de vin saccagé, qui avait cessé de couler, était jonché de débris. Sur la façade du château, quelque ligne de gaz reprenait soudain par bouffées, dardant des langues bleues, sinistres. L’aube apparaissait au fond du ciel ; les grandes allées silencieuses s’enfonçaient en des lointains livides. Des fumées montaient çà et là, tout droit, de pots à feu demi éteints.

La chaise de poste du Duc était en tête du cor-