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le crépuscule des dieux

à qui Otto, par raillerie, faisait mine de porter la traîne.

Mais Hans Ulric, qui descendait, le chassa d’un geste colère. Ce jeune homme assez petit, très noir et médiocrement bien fait, laissait voir dans toute sa personne, un air de souffrance rêveuse, qui relevait une figure entassée et quelque peu camuse. Le Duc l’avait eu en Russie, d’une esclave des Orloff, alors que, prince héréditaire, il commençait son voyage d’Europe. Il prit l’enfant, laissant quelque argent à la serve, dont celle-ci se maria ; — et Hans Ulric avait grandi côte à côte avec Christiane, fille d’une mère irlandaise. De là leur surprenante amitié ; tellement uns, que travail, promenades ou divertissements, ils ne se quittaient presque point. Elle était faite au tour, svelte, une taille longue et menue, et une marche de déesse, fort blonde, de grands yeux bleus d’enfant, une chair de rose et de lait, avec lesquels s’harmoniaient ce soir, son ajustement et ses pierreries qui étaient des aigues-marines et les plus belles opales. Elle en portait dans ses cheveux, mêlés de plumes et de marabouts, sur la gorge un collier d’émeraudes ; et sa robe en crêpe de Chine, d’un vert argenté presque blanc, était brodée de feuillages d’argent et boutonnée de perles fines.

Cependant des acclamations retentirent, et l’on vit s’avancer d’abord un long cortège de gardes