nait, par un instinct plus sûr que les laborieuses études des grandes personnes, et sans savoir au juste en quoi consistait la pureté, que sa vie était pure, car elle ne le voyait point mentir ni se dépenser en occupations frivoles ; elle distinguait la considération particulière que ses parents lui témoignaient ; et il lui apparaissait comme le modèle de toute perfection.
À onze ans, on lui donna à lire un de ses premiers livres ; la petite fille, qui devenait une jeune fille, s’enthousiasma, et elle sentit grandir en elle l’espèce de pieux respect qu’elle lui rendait dans le fond de son cœur. Et tout à coup, voilà que six ans après, à dix-sept ans, Léon Nicolaiévitch demande sa main ! Il en avait alors trente-trois. Elle a gardé vivace en elle la mémoire de la stupeur émerveillée dont elle fut alors confondue. Le bonheur et l’effroi l’accablèrent dans la même minute, et il en résulta pour elle un grand trouble de cœur et de pensée. Elle ne savait pas si elle aimait son ami, ou plutôt elle ne savait pas qu’elle l’aimait. Elle l’adorait et le vénérait, elle lisait