Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/178

Cette page a été validée par deux contributeurs.

aller jusqu’au bout de son personnage et de son idée ? Et l’homme d’argent serait-il complet, si l’auteur ne nous le montrait irrémédiablement ravagé par la passion des affaires qui est toute son âme et toute sa vie, et qui, peu à peu, l’a empli, saoulé, lui a façonné, dans une monstrueuse déformation, son visage tragique, refoulant, délogeant de son cœur tout sentiment, toute pensée qui n’est pas celle des affaires, et définitivement nettoyé de tout ce qu’il restait d’humain au fond de lui ? Voilà ce qui est la beauté, ce qui est la force de ce dénouement, et ceux qui l’ont condamné n’ont évidemment rien compris à la pièce.

— M’autorisez-vous à rapporter cela à Mirbeau ?

— Oui certes, portez-lui cela de ma part, et en même temps mes amitiés, bien que je ne le connaisse pas. J’aime beaucoup son talent. Je trouve en lui à la fois de l’Alexandre Dumas fils et du Maupassant. Je lis tous ses ouvrages. Son Journal d’une femme de chambre m’a extrêmement plu : c’est aussi un livre très fort, et d’une humanité aiguë. Ne