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— Je conteste précisément que ce soit là la question. La question, c’est le prodige de ce grossissement démesuré d’une affaire judiciaire, où j’ai refusé de trouver des éléments d’intérêt essentiel pour le monde entier. Je ne puis y voir autre chose qu’un extraordinaire phénomène de suggestion universelle analogue à celui dont je vous parlais tout à l’heure. L’affaire Dreyfus et l’affaire Shakspeare, exemples différents d’une maladie unique. Ici et là, c’est la presse qui est la grande organisatrice. Mais ni ceci ni cela ne correspond à la vérité et ne se recommande de la sagesse. Voilà pourquoi je me suis systématiquement récusé dans l’affaire Dreyfus. J’ai été, de toutes les manières, sollicité de me prononcer. J’ai reçu, de tous les pays, des montagnes de lettres ; certaines étaient impératives et ressemblaient à des mises en demeure. À aucune de ces lettres, à aucune sollicitation verbale je n’ai répondu ; dans ce tourbillon de folie, j’entendais garder mon sang-froid et mon libre arbitre, et, il faut bien que je vous le dise, vos raisons ne m’ont point ébranlé.