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On sait que Joinville, malgré son affection pour saint Louis, ne put se décider à le suivre dans sa seconde croisade : « Je fus, dit-il, moult pressé du roi de France et du roi de Navarre de me croiser. À ce je répondis que, tandis que j’avais été au service de Dieu et du roi outremer, les sergents au roi de France et au roi de Navarre m’avaient détruit et appauvri ma gent, tellement qu’il ne serait jamais heure (temps) qu’eux et moi nous n’en valions pis. Et leur disait ainsi, que si je voulais ouvrer au gré de Dieu, que je demeurerais ici pour mon peuple aider et défendre ; car si je mettais mon corps en aventure au pélérinage de la croix, là où je verrais tout clair que ce serait au mal et dommage de ma gent, j’en courroucerais Dieu qui mit son corps pour son peuple sauver. »

Joinville eut la douleur de voir confirmées toutes ses prévisions, puisque cette expédition, échouant comme la première, eut pour résultat de nouvelles catastrophes, entre lesquelles fut la mort du roi : « Et ouïs conter à monseigneur d’Alençon son fils que, quand il approchait de la mort, il appela les saints pour l’aider et secourir, monseigneur Saint Jacques, monseigneur Saint Denis, madame Sainte Geneviève. Après se fit le saint roi coucher en un lit couvert de cendres, et mit ses mains sur sa poitrine et en regardant vers le ciel rendit à notre Créateur son esprit, en cette heure même que le fils de Dieu mourut en la croix.

« Précieuse chose et digne est de plorer le trépassement de ce saint prince, qui si saintement et loyalement garda son royaume, et qui tant de belles aumônes y fit et qui tant de beaux établissements y mit. » Pas n’est