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n’est-ce pas, il ne reviendra pas !… Il… il… est mort ?

— Mort au champ d’honneur ! dit Jacquard, en serrant de nouveau dans ses bras sa femme presque évanouie.

Pendant de longs jours, le silence du deuil régna dans la pauvre mansarde où le travail seul faisait diversion à la douleur ; car, il fallait vivre, et Jacquard, faute d’une meilleure ressource, aidait sa femme dans la confection des chapeaux.

Cependant l’industrie lyonnaise, qu’on aurait cru ruinée à jamais, commençait à renaître grâce au patriotisme de plusieurs fabricants réfugiés en Suisse, en Allemagne, en Angleterre et qui laissaient à l’envi des positions avantageuses ou même des établissements prospères pour revenir dans la cité qui leur était chère. Les fabriques se rouvraient et Jacquard trouva sans peine à s’occuper ; mais, tout en travaillant de ses mains pour gagner le salaire quotidien, il revenait à ses anciens projets et rêvait pour l’industrie quelque découverte utile. Il s’inquiétait surtout de simplifier le métier adopté jusqu’alors pour la fabrication des étoffes de soie ; si l’on arrivait à supprimer ou remplacer la tireuse de lacs, à son avis on diminuerait de beaucoup la main d’œuvre et rendrait le travail beaucoup plus rapide et en même temps plus parfait. Il y réussit, et un premier modèle, qu’il devait perfectionner par la suite, lui valut, à l’Exposition universelle de 1801, une médaille de bronze et la même année il obtint, pour cette machine à laquelle il donnait le nom de tireuse de lacs, un brevet d’invention pour dix ans. Il fit un métier sur ce modèle et en 1802, à l’époque où la Consulta se réunit à Lyon