Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/418

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mon Dieu ! que ta bonté rend mon esprit confus
Qu’avecque raison je t’adore ;
Et combien l’enfer en dévore
Qui sont meilleurs que je ne fus !

Les rayons de ta grâce ont éclairé mes sens,
Le monde et ses plaisirs me semblent moins qu’un verre ;
Je pousse encor des vœux, mais des vœux innocens
Qui montent plus haut que la terre !

Le repentir pouvait-il s’exprimer en termes plus éloquents ? Ce langage d’ailleurs ne saurait surprendre de la part de celui qui devait léguer à la postérité le mémorable exemple de sa mort héroïque, plus digne d’admiration certes que les œuvres les plus sublimes du génie. « Revenu jeune de ses égarements, dit la Notice déjà citée, et ayant obtenu une pension de la munificence du roi, il acheta la charge de lieutenant particulier au baillage de Dreux ; il fut nommé ensuite assesseur criminel et commissaire-examinateur au même comté. » Mais les voyages qu’il faisait à Paris pour la représentation de ses pièces nécessitaient souvent son absence hors de la ville. Or, en 1650, une maladie épidémique se déclara dans la ville de Dreux où bientôt elle exerça les plus cruels ravages. Le nombre des victimes dépassait trente par jour ; déjà le maire et plusieurs des notables avaient succombé ; d’autres, cédant à l’épouvante, s’étaient hâtés de fuir. Rotrou, qui se trouvait à Paris, est averti ; tout aussitôt sa résolution est prise et il repart pour Dreux. De cette ville, en réponse à son frère qui le suppliait de s’éloigner du foyer de la contagion, il écrit… Mais laissons parler un contemporain dont le récit est admirable dans sa naïveté :