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espagnol ; que tout ce qu’on y trouvait de blâmable, au contraire, lui appartenait. »

Néanmoins, malgré leurs défauts, ces pièces, supérieures à ce qu’on avait fait jusqu’alors, avaient mis en relief le nom de l’auteur et attiré l’attention du cardinal de Richelieu, qui l’appela près de lui. Rotrou fit à Paris la connaissance de Corneille. « Une liaison franche s’établit entre eux. Corneille était né trois ans avant Rotrou[1] ; mais comme les deux succès de celui-ci avaient précédé le coup d’essai dramatique de Corneille, ce dernier, éminemment bonhomme, l’appelait son père. »

Mais bientôt les rôles changèrent. En 1636, le Cid parut, et avec un tel éclat, que le cardinal de Richelieu lui-même en prit de l’ombrage. La pièce par son ordre fut soumise à la censure de l’Académie française, qui s’honora par l’indépendance de son jugement et la mesure de sa critique… On sait que Labruyère a dit : « Le Cid enfin est l’un des plus beaux poèmes que l’on puisse faire ; et l’une des meilleures critiques qui aient été faites sur aucun sujet est celle du Cid. »

Rotrou, qui n’appartenait point à l’Académie, faute d’avoir sa résidence à Paris, se montra plus courageux encore : « Seul parmi tous les poètes dramatiques, dit M. A. Firmin Didot dans sa Notice, il prit la défense du Cid ; dès ce moment, il reconnut Corneille pour son maître, et depuis il appela toujours de ce nom celui qui, comme nous avons vu, se plaisait à le nommer lui-même son père. »

De ces sentiments, Rotrou voulut témoigner d’une

  1. Rotrou était né à Dreux en 1609.