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bonne sœur, cette Providence des infortunés, aux jours des grandes calamités, quand ces fléaux terribles, la guerre civile ou l’épidémie, le formidable choléra de 1832 en particulier, s’abattaient sur la capitale. M. de Melun, dans des pages émues, nous montre la sœur Rosalie prompte à courir là où le péril était le plus menaçant, toujours calme, forte, héroïque et par sa seule présence rassurant les plus timides. Que d’épisodes émouvants racontés à ce sujet et pour lesquels nous renvoyons le lecteur à l’intéressant ouvrage de M. de Melun ! Une ou deux citations seulement.

Un jour, le docteur Royer-Collard accompagnait un cholérique que l’on conduisait sur un brancard à la Pitié. Il est reconnu dans la rue : aussitôt, on crie : « Au meurtrier ! à l’empoisonneur ! à l’empoisonneur ! car le peuple alors croyait au poison plutôt qu’au fléau. » En vain le docteur soulève le drap qui cachait le visage du malade, et s’efforce de prouver qu’en l’accompagnant le médecin cherche à le sauver et non à le faire périr. La vue du moribond ajoute à l’exaspération, les cris et les menaces redoublent ; un ouvrier s’élance, un outil tranchant à la main, lorsqu’à bout d’arguments, M. Royer-Collard s’écrie : « Je suis un ami de la sœur Rosalie.

— C’est différent ! répondent aussitôt mille voix : la foule s’écarte, se découvre et le laisse passer. »

Un offlcier de la garde mobile, en juin 1848, poursuivi par des insurgés, avait pu se réfugier dans la cour de la maison de la rue de l’Épée de Bois. Mais les insurgés l’ont suivi et réclament leur prisonnier que les sœurs, la supérieure en tête, couvrent de leurs corps.