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pecté de toute l’armée par sa valeur accompagnée d’une douceur et d’une sagesse merveilleuse, le roi l’estimait beaucoup, et a dit, après sa mort, que c’était un homme qui pouvait prétendre à tout. Il s’appelait Roquevert. Croyez-vous que frère Roquevert ne valait pas bien frère Muce ? Et si M. de la Trappe l’avait connu, aurait-il mis, dans la Vie du frère Muce, que les grenediers font profession d’être les plus grands scélérats du monde ? Effectivement on dit que dans cette compagnie il y a des gens fort réglés. Pour moi je n’entends guère de messe dans le camp, qui ne soit servie par quelque mousquetaire, et où il n’y en ait quelqu’un qui communie et cela de la manière du monde la plus édifiante.

« …. Je ne puis finir sans vous dire un mot de M. de Luxembourg. Il est toujours vis-à-vis des ennemis…. On lui amena avant-hier un officier espagnol qu’un de nos partis avait pris et qui s’était fort bien battu. M. de Luxembourg lui trouvant de l’esprit lui dit :

— Vous autres Espagnols, je sais que vous faites la guerre en honnêtes gens, et je la veux faire avec vous de même.

« Ensuite il le fit dîner avec lui, puis lui fit voir toute son armée. Après quoi, il le congédia, en lui disant :

— Je vous rends votre liberté ; allez trouver M. le prince d’Orange, et dites-lui ce que vous avez vu.

« On a su aussi par un rendu qu’un de nos soldats s’étant allé rendre aux ennemis, le prince d’Orange lui demanda pourquoi il avait quitté l’armée de M. de Luxembourg :

— C’est, dit le soldat, qu’on y meurt de faim ; mais