Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/338

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vous, si vous continuez d’être imprudent à ce point.

— J’en suis tout honteux, répondit Boileau ; mais quel est l’homme à qui il n’échappe une sottise ?

Boileau ne savait ni dissimuler ni flatter. Il eut cependant par hasard quelques saillies assez heureuses. Un jour le roi lui demandant son âge, il répondit :

— Je suis venu au monde un an avant votre Majesté pour annoncer les merveilles de son règne.

À une certaine époque, l’affectation de substituer le mot de gros à celui de grand régnait à Paris comme en quelques provinces où l’on disait un gros chagrin pour un grand chagrin : Le roi demandant à Boileau ce qu’il pensait de cet usage, le poète répondit :

— Je le condamne parce qu’il y a bien de la différence entre Louis le Gros et Louis le Grand.

Quelques jours après la mort de Racine, Boileau vint à la cour où depuis longtemps il ne paraissait plus, et comme il parlait au roi de l’intrépidité chrétienne avec laquelle Racine avait vu la mort s’approcher :

— Je le sais, répondit le roi, et j’en ai été étonné, il la craignait beaucoup cependant, et je me souviens qu’au siége de Gand vous étiez le plus brave des deux.

Le roi tenait par hasard sa montre à la main ; en la montrant au poète, il lui dit :

— Souvenez-vous que j’ai toujours une heure par semaine quand vous voudrez venir.

Boileau cependant ne retourna jamais à la cour.

— Qu’irais-je y faire ? répondait-il à ses amis qui le pressaient à ce sujet, je ne sais plus louer.

Dans un âge avancé déjà, il donna une nouvelle édition de ses ouvrages qu’il revit avec tout le soin dont il