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Là brillait le teint vif des pêches empourprées,
Ici le riche émail des prunes diaprées ;
Là des rouges pavis le duvet délicat ;
Ici le jaune ambré du roussâtre muscat :
Tous fruits dont l’œil sans cesse admirait l’abondance,
La beauté, la grosseur, la discrète ordonnance ;
Jamais sur leurs rameaux également chargés,
La main si sagement ne les eût arrangés[1].


D’après ce qu’on raconte, c’était un des grands plaisirs du Roi de se promener dans ce jardin : «Louis XIV, dit Pluche, après avoir entendu Turenne ou Colbert, Racine ou Boileau, s’entretenait avec La Quintine et se plaisait souvent à façonner un arbre de sa main. »

La Quintinie mettait à profit ces conversations pour faire sa cour au Roi. Connaissant que la figue était son fruit de prédilection, il mit tous ses soins à en perfectionner la culture, et dans son livre[2] il lui consacre de nombreux paragraphes et ne lui ménage pas les éloges : « Les bonnes figues mettent ici d’accord toutes ces contestations ; elles emportent le prix, sans contredit, comme étant sûrement le fruit le plus délicieux qu’on puisse avoir en espalier. » Dans le chapitre qui précède, cependant, c’est la prune qui semblait avoir toutes les préférences de notre horticulteur : « Peu de gens se sont avisés de se déclarer sur ceci en faveur des bonnes prunes, je ne dis pas de toutes sortes de prunes, mais seulement de quatre ou cinq sortes des meilleures ; et

  1. Perrault, Épître à La Quintinie.
  2. Instructions pour les jardins fruitiers. 2 vol. in-4°, 1690.