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Tout cependant pour l’instant souriait à Poussin, pour qui la France était le vrai pays de Cocagne, comme il le dit si bien dans sa jolie lettre de remerciement à M. de Chantelou : « Monsieur et patron, mardi dernier, après avoir eu l’honneur de vous accompagner à Meudon et y avoir été joyeusement, à mon retour, je trouvai que l’on descendait en ma cave un muids de vin que vous m’aviez envoyé. Comme c’est votre coutume de faire regorger ma maison de biens et de faveurs, mercredi, j’eus une de vos gracieuses lettres par laquelle je vis que particulièrement vous désiriez savoir ce qu’il me semblait dudit vin. Je l’ai essayé avec mes amis aimant le piot (oh ! oh ! grave Poussin !) ; nous l’avons trouvé très-bon, et je m’assure, quand il sera rassis, qu’on le trouvera excellent. Du reste, nous vous servirons à souhait, car nous en boirons à votre santé, quand nous aurons soif, sans l’épargner ; aussi bien, je vois que le proverbe est véritable qui dit : « Qui chapon mange, chapon lui vient. Mêmement, hier, M. de Costage m’envoya un pâté de cerf si grand que l’on voit bien que le pâtissier n’en a retenu sinon les cornes. Je vous assure, monsieur, que désormais je ne manquerai pas à commencer par le dimanche de me réjouir, comme je fis le dimanche passé, afin que la semaine suivante soit ce qu’on dit, que toute l’année est au pays de Cocagne. Je vous suis le plus obligé homme du monde, comme aussi je vous suis le plus dévotieux serviteur de tous vos serviteurs. »

Tout cela n’est-il pas dit le plus agréablement du monde et assaisonné du pur sel attique. Voilà certes un homme heureux ; joignez à cela le bonheur de l’inspiration ; car Poussin, n’ayant pas tardé à reprendre ses pin-