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bout de quelques semaines. Avant son départ, cependant, il avait eu soin de recommander tout particulièrement le jeune Français au cardinal Barberini, neveu du Pape ; mais le cardinal, presque aussitôt, avait dû quitter Rome pour se rendre en France et en Espagne en qualité de légat du Saint-Siége. Ces circonstances, que nul n’eût pu prévoir, mirent Poussin dans une position critique qui lui rappelait ses plus mauvais jours. Sans protecteurs, sans amis, sans argent, dans une ville étrangère dont il ne savait pas encore la langue, il eut grand’peine dans les premiers temps à trouver le placement de quelques tableaux à des prix dérisoires. On cite entre autres deux batailles, toiles grandes d’au moins deux pieds, qui lui furent payées au prix de sept écus chacune. Par bonheur, il ne tarda pas à faire connaissance avec des artistes, aussi peu fortunés que lui, sans doute, mais plus anciennement établis dans la ville, et comme lui, pleins de feu et d’ardeur, le peintre Algardi, depuis l’Algarde, et le sculpteur Duquesnoy, dit le Flamand, dont les modèles d’enfants ornent tous les ateliers. Les trois artistes s’entr’aidèrent autant qu’ils purent ; mais les ressources de chacun étaient plus que bornées, et cette intimité presque fraternelle leur fut surtout utile et avantageuse au point de vue du progrès de leur art par l’échange continuel d’idées et la communauté des études, auxquelles ne manquait pas le conseil intelligent. Poussin, en dépit des obstacles résultant de sa situation précaire, marchait à son but avec une héroïque persévérance : il copiait sans relâche les antiques, dont il s’efforçait de s’assimiler les plus beaux types, s’instruisait dans l’anatomie, etc. Il