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François et saint Charles Borromée, pour les Capucins de Blois. Mais, sans doute, les prix furent bien modiques, inférieurs même à son talent en germe, puisque, résolu, coûte que coûte, à revenir à Paris, où il pouvait espérer trouver des ressources plus sérieuses, Poussin prit le parti de se mettre en route à pied, le bâton à la main, faute d’argent pour payer la voiture, à la vérité assez chère à cette époque.

Aujourd’hui que les communications sont si multipliées, si faciles, on a peine à s’imaginer combien pénible et long était alors un pareil voyage et ce qu’il fallut d’énergie, presque d’audace au jeune artiste pour l’entreprendre et l’achever dans les conditions où il se trouvait. Citons à ce sujet une belle page du dernier historien de Poussin, qui est de celles qu’on ne rencontre pas fréquemment, soit dit en passant, chez les biographes modernes :

« Lorsque nous voyons le jeune homme de vingt ans, parcourant, triste et pensif et peut-être sous les haillons de la misère, la route qui sépare le Poitou de Paris, nous ne pouvons nous empêcher de faire des réflexions amères et en même temps consolantes sur la destinée de l’homme. Quelle est donc cette force qui à son insu l’anime et le soutient malgré ses défaillances ? Quel est ce guide qui, sans lui révéler le mystère de son avenir, dirige ses pas, cachant ses sages desseins sous les dehors du hasard et soutenant l’espérance au milieu des alternatives de la faiblesse et du courage ? Quelle main invisible s’étend sur le pauvre voyageur, affermit ses pas chancelants, et prépare dans un obscur avenir la sécurité après les inquiétudes, la gloire après