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forme semblait surtout dirigée contre Moncey. Napoléon répondit d’un ton calme mais sévère à l’accusateur :

« Vous ne vous connaissez pas en hommes : Moncey est honnête jusque dans ses pensées les plus intimes. »

L’opinion de l’Empereur sur le vieux soldat n’a jamais varié, puisqu’à Sainte-Hélène il écrivait : « Moncey est un honnête homme. »

Cet honnête homme, cet héroïque soldat joignait à tant de belles et rares qualités une singulière modestie, témoin la lettre qu’il écrivait, au mois d’août 1794, pour refuser le commandement en chef de l’armée des Pyrénées-Orientales, et dans laquelle se lisait cette phrase : « Je serais criminel envers la République, et surtout envers moi-même, si j’acceptais un poste que ma conscience me dit hautement de refuser. »

Peu de mois avant sa mort, voulant laisser un souvenir à ceux qu’il aimait et estimait, il donna à ses deux aides de camp, Lheureux et de Bellegarde, ses croix de la Légion d’Honneur, reliques du vieux soldat. Puis un matin regardant l’épée de connétable, qu’au sacre du roi Charles X il avait reçue des mains du monarque, il murmura :

— Je veux qu’on la donne à mon vieil ami le maréchal Soult.

Mais aussitôt se reprenant : « Oh ! non, non, je ne puis rien donner au maréchal Soult, il est bien plus grand que moi, ses services sont autrement importants que les miens ; oh ! non, ce n’est pas moi qui puis donner une telle épée au maréchal Soult… »

Le duc de Dalmatie sans doute n’ignorait pas cette circonstance, quand sur la tombe du maréchal, d’une